
Consigne 1 : vous êtes dans un carré dans le train : racontez ce qui se passe autour de vous
Mon téléphone à plat, en train de charger, pas de musique, pas de podcast pour me distraire. Livre terminé, il me reste 1h de train. Je fais mine de regarder à travers la fenêtre mais mes yeux se baladent sur le reflet de mes voisins de carré. Le gars à côté de moi est complètement corporate. Sa chemise trop blanche et trop serrée le gêne pour taper son rapport sur l’ordi payé par sa boîte. Et puis il fait la grimace, dérangé par la joie un peu trop éclatante du gamin en face qui joue à promener sa petite voiture en plastique sur la table, le siège, le sol, sa mère, fatiguée mais attendrie. Il se raconte son monde en babillant dans une langue rien qu’à lui. Elle ouvre les yeux de temps en temps et lâche un regard désolé à Mister StartupNation qu’elle accompagne d’un petit « chut » désinvolte. Il râle et claque sa langue. Je souris à la petite famille. Je lis merci dans son regard à elle, j’apprécie la joie simple et éclatante du petit. J’aime le train pour ça, je crois.
Consigne 3 : à partir des deux fiches personnages que tu as reçues de tes voisin-e-s issues de la consigne précédente, écris la rencontre des deux personnages
Léon est assis au coin du comptoir avec sa grande sœur Zoé, un vendredi soir. Elle voulait lui changer les idées, elle trouve qu’il travaille trop en ce moment. C’est vrai que cette cinquième année de médecine commence à ne laisser que peu de place au reste. Sauf à sa légère obsession pour son voisin au cours de médecine générale.
– Tu sais, ça fait une heure complète que tu me parles de lui, tu connais son emploi du temps, son parfum, ses habitudes alimentaires, les livres qu’il lit, la musique qu’il écoute, toute sa garde-robe… et moi, ce qui m’émerveille, c’est surtout que tu ne connais toujours pas son prénom !
Zoé rigole et donne un petit coup de coude à Léon qui rougit et baisse les yeux. Oui, il sait tout ça. Il n’a pas peur de beaucoup de choses, à part du chihuahua de la voisine et peut-être, bon d’accord, de tout ce qui est trop parfait, mais surtout il a peur de parler à son voisin du cours de médecine générale. En fait, il a peur, en essayant de simplement lui demander son prénom, d’exploser un peu et de crier « Je t’aime éperdument ! » sans le vouloir. Mais même s’il aime beaucoup Zoé, il ne peut pas lui dire ça.
Après deux chocolats chauds et un cocktail, Zoé embrasse son frère et repart. Léon va rester un peu. Il aime bien ce bar. Il va prendre une bière et lire, à son coin de comptoir, la biographie historique qu’il s’est acheté dans l’après-midi.
Salia entre dans le bar sombre. La lumière rouge et rose se reflète sur son juste-au-corps pailleté et argenté. Perchée sur ses hauts talons, elle passe une main légère sur ses cheveux blonds plaqués en arrière pour la soirée. Pourquoi ce bar ? Pourquoi ce soir ? Elle ne sait pas vraiment, elle est juste habitée par le sentiment qu’il est peut-être ici et maintenant, qu’elle va enfin le trouver. Elle promène ses yeux dans la salle et surtout s’attarde sur les ombres. Elles glissent et filent, et se mélangent et se cachent. Elle retire ses chaussures et suis au sol les ombres. Elle se faufile avec elles sous les tables et parmi les chaises.
Personne ne semble voir Salia. Mais Léon la voit. Brillante parmi l’obscurité, ses paillettes font à Léon l’effet d’écailles. Il pense à son poisson Maurice, qu’il adore. Mais non. Cette femme qui rampe avec grâce est plutôt un serpent. Elle inspecte maintenant son ombre à lui. Il lui sourit.
– Vous cherchez quelque chose ?
– Oui, mon serpent.
Elle a levé la tête vers lui mais ne le regarde pas vraiment.
– Vous avez un serpent ?
– Non, pas encore. Mais je crois qu’il est ici, ce soir.
– Vous voulez de l’aide pour le trouver ?
– C’est gentil, mais vous ne pouvez pas m’aider, jeune homme. Je dois le charmer, vous comprenez ?
Léon, doux, lui répond :
– Oui, bien sûr.
– Merci. On ne me comprend pas toujours.
Elle a dit ça en laissant son regard croiser celui du gentil garçon. Il voit courir sur sa peau un frisson.
– Vous voulez mon pull ?
– Non, c’est gentil. Le sol est froid mais j’ai le sang chaud.
Merci à Juliette et Laurence pour leurs personnages incroyables !